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STRESS QUI DEMANGE

Journal International de Médecine - 10 février 2025

Que fait le stress dans l’inflammation cutanée allergique ?

 

Dr Marie-Line Barbet | 10 Février 2025

L’influence du stress psychologique sur le cours des maladies est constatée depuis longtemps. En période de stress, l’activation de l'axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien et du système nerveux sympathique (SNS), entraîne la libération systémique de glucocorticoïdes (GC), d’adrénaline et de noradrénaline.

Il s’ensuit une accélération du rythme cardiaque et une élévation de la pression artérielle. Or la plupart des types de cellules immunitaires possèdent des récepteurs à ces « hormones du stress » et la stimulation de ces récepteurs en cas de stress est susceptible de moduler les activités immunologiques.

Ainsi, les glucocorticoïdes et les catécholamines inhibent fortement la réponse TH1, entraînant une apoptose induite et une activation réduite des cellules TH1 et des cellules natural killer. Les pathologies tumorales et infectieuses seraient ainsi davantage susceptibles de se développer dans un contexte de stress psychologique. 

Qu’en est-il des « maladies allergiques » ? La dermatite atopique (DA), qui se caractérise par une inflammation cutanée avec infiltration d'éosinophiles, des taux sériques élevés d'IgE spécifiques aux allergènes et une expression accrue des cytokines de type 2 dans les tissus enflammés est également exacerbée par le stress psychologique. 

Davantage d’éosinophiles en cas de stress et des macrophages moins performants

Une équipe a exploré les mécanismes cellulaires et moléculaires par lesquels le stress psychologique exacerbe l'inflammation allergique médiée par les IgE (IgE-CAI IgE-mediated cutaneous allergic inflammation). Pour cela, ils ont soumis des souris à un stress de contention (elles étaient enfermées (SE) dans des petits tubes coniques munis de trous d'aération pendant 2 heures chaque jour pendant 7 jours consécutifs).

Des souris « en liberté » (SL) dans la cage servaient de témoins. Les IgE-CAI ont été provoquées par une injection intraveineuse de 300 μg d'IgE anti-trinitrophénol (TNP), suivie d'une provocation antigénique avec 10 μg de TNP19-ovalbumine (OVA) dans l'oreille droite et 10 μg d'OVA dans l'oreille gauche le jour suivant. 

Par rapport aux SL, les souris SE ont présenté une exacerbation de l'IgE-CAI avec, à l’histologie (de l’oreille), une infiltration cellulaire plus importante.

Le nombre d'éosinophiles chez les souris SE était multiplié par 2 à 4 par rapport à celui des SL, mais le nombre de basophiles, de neutrophiles et de monocytes/macrophages PD-L2+ (exprimant le programmed cell death-ligand 2) ne différait pas entre les groupes d’animaux. Ceci souligne l’implication d’une accumulation d'éosinophiles dans l’exacerbation de l’IgE-CAI induite par le stress. 

Pour déterminer quels systèmes interviennent dans l'exacerbation de l'IgE-CAI induite par le stress il a été procédé chez les souris à une surrénalectomie bilatérale ou à une dénervation sympathique systémique suivies d’une contention.

L'exacerbation des IgE-CAI induite par le stress s'est produite chez les souris ayant subi une surrénalectomie, mais pas chez celles ayant eu une dénervation du système sympathique Ceci indique que la noradrénaline dérivée des nerfs sympathiques est importante pour l'exacerbation de l'IgE-CAI.

Le récepteur β2-adrénergique (Adrb2), un récepteur de la noradrénaline, est exprimé sur divers types de cellules, y compris les cellules immunitaires.

Parmi les cellules isolées des lésions cutanées, les ARNm Adrb2 étaient préférentiellement exprimés par les macrophages PD-L2+ ce qui suggère que ces macrophages sont particulièrement affectés par la noradénaline induite par le stress.

Les macrophages PD-L2-positifs chez les souris stressées ont une capacité d’efferocytose (processus d'élimination des cellules apoptotiques) réduite. Les cellules mortes qui ne sont pas phagocytées par les macrophages anti-inflammatoires induisent l'expression de Ccl24 dépendant de la Caspase-1 sur les sites inflammatoires, induisant un infiltrat éosinophile plus important et exacerbant par conséquent l'IgE-CAI. 

References

Urakami H, Yoshikawa S, Nagao K, et al. Stress-experienced monocytes/macrophages lose anti-inflammatory function via β2-adrenergic receptor in skin allergic inflammation. J Allergy Clin Immunol. 2024 Nov 19:S0091-6749(24)01231-4. doi: 10.1016/j.jaci.2024.10.038.

Date de dernière mise à jour : 12/02/2025

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