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PARKINSON & ALZHEIMER

Article du JIM du 20 septembre 24 - Alzheimer

La pollution lumineuse, possible facteur de risque de maladie d’Alzheimer

 

Dr Roseline Peluchon | 20 Septembre 2024

De nombreuses communes françaises luttent désormais contre la pollution lumineuse. Elles avancent des arguments économiques, écologiques, mais elles peuvent aussi se prévaloir d’objectifs de santé publique. Car les études ont montré que la pollution lumineuse peut avoir des effets négatifs sur la santé, et serait en lien avec des troubles du sommeil, l’anxiété, ou encore des troubles dépressifs. Une nouvelle étude récemment publiée a, quant à elle, étudié le lien entre la pollution lumineuse et la maladie d’Alzheimer. 

L’étude a comparé les expositions à différentes intensités lumineuses nocturnes et la survenue d’une maladie d’Alzheimer. Elle est menée sur les données de 48 états américains, entre 2012 et 2018, pour lesquels l’intensité lumineuse nocturne moyenne était répertoriée, ainsi que sur la prévalence de la maladie d’Alzheimer, fournie par Medicare. 

Une étude dans les 48 états américains

L’analyse des données révèle des différences statistiquement significatives de la prévalence de la maladie d’Alzheimer selon les différents états, les états ayant l’intensité lumineuse la plus élevée pendant la nuit étant ceux où la prévalence de la maladie d’Alzheimer est aussi la plus élevée. Le lien est présent pour l’ensemble de la période considérée, et pour chaque année examinée séparément, et quel que soit l’âge des personnes, le sexe, et l’origine ethnique. Il est retrouvé tant au niveau des états que des comtés. 

Un facteur comme d’autres ?

Les auteurs notent que l’intensité lumineuse nocturne moyenne présente un lien plus fort avec la maladie d’Alzheimer que ce qui est constaté pour d’autres facteurs de risque, comme l’abus d’alcool, l’insuffisance rénale chronique, la dépression, l’insuffisance cardiaque ou l’obésité. Cependant, d'autres covariables étaient plus fortement associées à la maladie d'Alzheimer que l'intensité lumineuse, notamment la fibrillation auriculaire, le diabète, l'hyperlipidémie, l'hypertension et l'accident vasculaire cérébral.

Cependant, pour les personnes de moins de 65 ans, l'intensité lumineuse moyenne était associée à la prévalence de la MA même en prenant en compte toutes les covariables suggérant que ces personnes pourraient être particulièrement sensibles aux effets de l’exposition à la lumière la nuit.

La pollution lumineuse pourrait donc être impliquée dans le développement ou la progression de la démence et des maladies neurodégénératives, autant que d’autres facteurs suspectés, comme l’allongement de la durée de vie, l’émergence de pathologies liées au mode de vie comme l’obésité, le diabète et de nombreux facteurs environnementaux relatifs à l’urbanisation et l’industrialisation. 

Plusieurs explications sont évoquées par les auteurs. La relation pourrait être établie par l’intermédiaire de perturbations du rythme circadien en lien avec la pollution lumineuse. Il pourrait s’agir aussi d’un phénomène biochimique de sécrétion d’une cytokine pro-inflammatoire : il a été démontré que l’exposition de souris à un excès de lumière est à l’origine de la production d’interleukine 1β (IL-1β), elle-même associée à la maladie d’Alzheimer.

References

Voigt RM, Ouyang B, Keshavarzian A. Outdoor Nighttime Light Exposure (Light Pollution) is Associated with Alzheimer's Disease. medRxiv [Preprint]. 2024 Feb 15:2024.02.14.24302831. doi: 10.1101/2024.02.14.24302831. 

Dans le Journal International de Médecine du 7 octobre 2024

DT2 : les ISGLT2 diminuent-ils le risque de démence et de maladie de Parkinson ?

Dr Philippe Tellier | 08 Octobre 2024

La prévalence et l’incidence des maladies neurodégénératives, qu’il s’agisse de la maladie de Parkinson, de la maladie d’Alzheimer, ou de la démence vasculaire, sont en progression constante à l’échelon mondial, du fait du vieillissement inexorable de sa population. Le diabète de type 2 constitue un facteur de risque impliqué dans le fléchissement cognitif ou encore l’aggravation des symptômes de la plupart des maladies neurodégénératives précédemment évoquées, tout particulièrement chez le sujet âgé.

Des stratégies préventives efficaces doivent être instaurées rapidement dans un tel contexte, et la place de la pharmacothérapie mérite d’être évoquée, d’autant que l’insulinorésistance et la diminution du métabolisme cérébral du glucose pourraient avoir en commun certains mécanismes pathogéniques. 

A cet égard, les inhibiteurs du cotransporteur sodium-glucose, connus sous l’acronyme iSGLT2 seraient-ils doués d’effets pléiotropes, à l’instar d’autres classes pharmacologiques (telles celle des statines à leurs débuts) ? La question peut se poser à la lecture de certaines études qui leur attribuent, outre un effet cardio- et néphro-protecteur, des vertus protectrices qui s’étendraient à d’autres organes que le cœur et le rein… en l’occurrence le cerveau. 

L’amélioration de la fonction mitochondriale et de l’autophagie, par le biais des lysosomes, ainsi que l’augmentation de la cétogenèse seraient-elles bénéfiques au niveau cérébral au point d’intervenir dans la pathogénie des maladies neurodégénératives, de retarder leur apparition ou de diminuer leur expression symptomatique ? La correction des facteurs de risque cardiovasculaire sous l’effet des iSGLT2 entre-t-elle en ligne de compte ? 

Une étude rétrospective sud-coréenne : près de 360 000 participants 

Autant de questions auxquelles une étude de cohorte rétrospective sud-coréenne apporte des éléments de réponse. Ont été initialement inclus 1 348 362 participants, tous atteints d’un diabète de type 2 et âgés d’au moins 40 ans. Les données ont été recueillies auprès de l’Assurance maladie du pays. Un traitement antidiabétique a été débuté entre 2014 et 2019 et deux groupes ont été constitués, avec appariement selon la méthode du score de propension.

Le groupe d’intérêt a été constitué de patients qui ont bénéficié d’une prescription d’un iSGLT2, d’autres antidiabétiques oraux ayant été administrés dans le groupe témoin. In fine, l’analyse a porté sur une cohorte de 358 862 participants (âge moyen 57,8±9,6 ans ; hommes : 58,0 %). Les critères de jugement primaire ont été définis par l’incidence de chacune des maladies neurodégénératives suivantes : maladie d’Alzheimer, démence vasculaire et maladie de Parkinson.

Les critères secondaires, pour leur part, ont porté sur toutes les démences, quelle que soit leur cause, et la combinaison des trois pathologies neurodégénératives précédentes. Les données ont été traitées à l’aide du modèle des risques proportionnels de Cox. 

Moins de démences dans le groupe exposé aux iSGLT2

Au total, 6 837 évènements imputables à des états démentiels ont été enregistrés au cours du suivi. Pour ce qui est des critères primaires, l’exposition aux i SGLT2 a été associée à une diminution modeste du risque de maladie d’Alzheimer, le hazard ratio ajusté (HRa) correspondant étant de fait estimé à 0,81 [IC 95% 0,76–0,87]. Il en a été de même pour le risque de démence vasculaire (HRa=0,69 [0,60–0,78]) ou encore de maladie de Parkinson (HRa=0,80 [0,69–0,91]).

Pour les démences toutes causes confondues, le HRa a été estimé à 0,79 [0,69–0,90], l’adjonction de la maladie de Parkinson ne changeant guère ce résultat (HRa=0,78 [0,73–0,83]). Ces associations n’ont pas été affectées par la prise en compte du sexe, de l’index de comorbidité de Charlson, des complications du diabète, des comorbidités ou encore des divers traitements. Les analyses de sensibilité avec ajustements selon diverses variables biocliniques (pression artérielle, glycémie, profil lipidiques, fonction rénale) ont abouti à des résultats reproductibles. 

Cette étude rétrospective sud-coréenne, du type cas-témoins, plaide en faveur d’associations significatives entre l’exposition aux iSGLT2 et le risque de maladies neurodégénératives. Cette classe pharmacologique aurait-elle le don de prévenir ces dernières ou de retarder leur expression symptomatique ? D’autres études de cohorte de préférence prospectives sont nécessaires pour confirmer ces résultats et rechercher un éventuel lien de causalité. 

References

Kim HK, Biessels GJ, Yu MH, et al. SGLT2 Inhibitor Use and Risk of Dementia and Parkinson Disease Among Patients With Type 2 Diabetes. Neurology. 2024 Oct 22;103(8):e209805. doi: 10.1212/WNL.0000000000209805.

Date de dernière mise à jour : 24/10/2024

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