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EPAULES : CAPSULITE

Du Journal International de Médecine du 6 février 2025

Capsulite rétractile : les traitements (quelque peu) efficaces

 

Dr Philippe Tellier | 06 Février 2025

La capsulite rétractile de l'épaule qui porte également le nom d’« épaule gelée » se caractérise par la survenue de scapulalgies progressives qui s’accompagnent d’un enraidissement croissant de l’épaule. A la phase d’état, l’épaule est réellement bloquée dans toutes les directions de l’espace. Sa signature histopathologique est un épaississement plus ou moins inflammatoire (selon le stade évolutif) de la capsule articulaire.

Sa prévalence au sein de la population générale est comprise entre 2 % et 5 % et elle frappe plutôt la femme âgée de 40 à 60 ans. Elle se distingue de la périarthrite scapulo-humérale (PASH) qui correspond à une inflammation plus ou moins diffuse des tissus mous périarticulaires, à type de tendinites (notamment de la coiffe des rotateurs) ou encore de bursite.

Le tableau clinique de la PASH diffère de celui de la capsulite rétractile, en ce sens que ses manifestations douloureuses sont volontiers plus localisées, variables dans le temps et l’espace ou encore déclenchées par certains mouvements spécifiques.

Dans les deux cas, le passage à la chronicité n’est pas sans déboucher sur des difficultés thérapeutiques, la palme revenant cependant à l’épaule gelée. La précision du diagnostic, la physiothérapie, les traitements anti-inflammatoires et, dans certains cas de PASH, une intervention chirurgicale ciblée, permettent d’améliorer le pronostic fonctionnel. 

Une revue de la littérature des pharmacothérapies utilisées à la phase précoce

Les pharmacothérapies sont-elles d’un quelconque secours dans le traitement de la capsulite rétractile à son stade précoce, alors que la douleur et la raideur sont en progression sans que l’épaule soit pour autant totalement gelée ? Une revue systématique de la littérature médicale internationale, couplée à une méta-analyse en réseau, permet de répondre à cette question. Les bases de données MEDLINE, EMBASE, Cochrane Central Register of Controlled Trials ont été mises à contribution jusqu’au 24 février 2022.

Ont été ciblées les études contrôlées ou non, évaluant les pharmacothérapies suivantes : injections intra-articulaires (IA) de corticostéroïdes (CS), de plasma riche en plaquettes (PRP) ou d’acide hyaluronique, ainsi que les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) administrés par voie orale. Les effets de ces traitements sur les scapulalgies, la mobilité articulaire et l’amplitude des mouvements ont été pris en compte dans l’analyse. 

Trente et une études en tout et pour tout 

Cette revue a identifié au total 3252 articles, parmi lesquels ont été in fine retenus 31 études dignes d’intérêt, dont 22 essais contrôlés. Les injections IA de corticostéroïdes (8 essais, 340 participants) et de PRP (3 essais contrôlés, n = 177) ont montré une amélioration significative quoique modeste de la douleur et de la mobilité globale de l’épaule à 12 semaines par rapport à la physiothérapie.

Les injections IA de PRP, pour leur part, ont également amélioré l'amplitude des mouvements dans les mêmes délais, notamment en comparaison avec les injections IA de corticoïdes. Les AINS oraux (2 essais contrôlés, n = 44) et les injections IA d’acide hyaluronique (2 essais contrôlés, n = 42) n'ont pas démontré de bénéfice significatif, quel que soit le critère. 

Force est de constater que les études retenues sont peu nombreuses et portent sur des effectifs restreints, preuve que la capsulite rétractile, en dépit de sa prévalence élevée et de son retentissement sur la qualité de vie et l’aptitude à certaines professions, ne suscite pas un intérêt à la hauteur de ses enjeux. De surcroît, les études publiées sont à la fois hétérogènes et exposées à un risque de biais élevé, le niveau de preuve qu’elles apportent apparaissant limité. 

Place à la recherche

Certes les injections IA de corticostéroïdes et de PRP semblent apporter quelque soulagement chez certains patients, mais le bénéfice thérapeutique semble modeste et tout indique que des recherches complémentaires s’imposent pour changer la donne et sortir de l’impuissance thérapeutique. La physiopathologie de la capsulite rétractile reste mal comprise et le processus inflammatoire initial suivi d'une fibrose capsulaire complexe la rendent particulièrement résistante aux traitements conventionnels.

La physiothérapie et le soutien psychologique restent, à l’heure actuelle, le meilleur remède (à défaut d’autres) et les pharmacothérapies jusqu’à preuve du contraire jouent un rôle bien modeste, d’autant que leur efficacité paraît transitoire. Comprendre que la douleur diminue avec le temps, même si la récupération de l’amplitude peut être incomplète, doit aider à réduire l’anxiété qui fait partie intégrante du tableau clinique. 

References

Berner JE, Nicolaides M, Ali S, et al. Pharmacological interventions for early-stage frozen shoulder: a systematic review and network meta-analysis. Rheumatology (Oxford). 2024 Mar 27;63(12):3221–33. doi: 10.1093/rheumatology/keae176. 

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Date de dernière mise à jour : 07/02/2025

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