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CALIFORNIE : L'ENFER !

France Info 11 janvier 2025

A PROPOS DES INCENDIES EN CALIFORNIE

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La facture des dégâts provoqués par les flammes pourrait atteindre 20 milliards de dollars pour les assureurs, qui ont déjà arrêté de couvrir des milliers de particuliers face aux risques grandissants.

Il s'agit des incendies "les plus dévastateurs" de l'histoire de la Californie, selon le président Joe Biden. "Cela m'a fait penser à une scène de guerre, avec des bombardements", a-t-il déclaré lors d'une réunion à la Maison Blanche à propos de la situation à Los Angeles. Depuis mardi 7 janvier, la mégalopole fait face à plusieurs feux d'ampleur. La bilan toujours provisoire évoque au moins dix morts, près de 143 km2(Nouvelle fenêtre) partis en fumée et des milliers de bâtiments détruits ou endommagés par les flammes, attisées notamment par le réchauffement climatique.

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A ce stade, les estimations des pertes se situent entre 10 et 15 milliards de dollars. D'après les analystes de JP Morgan cités par CNBC(Nouvelle fenêtre), le coût pour les assureurs pourrait atteindre 20 milliards de dollars. Mais, selon le site spécialisé AccuWeather.com(Nouvelle fenêtre), le coût total de ces incendies (dommages matériels, pertes financières...) pourrait atteindre 135 à 150 milliards de dollars, notamment parce que les quartiers touchés – Pacific Palisades, Santa Monica, Malibu – comptent les maisons parmi les plus chères des Etats-Unis. A titre de comparaison, l'incendie ayant ravagé l'île hawaïenne de Maui en 2023 a causé entre 13 et 16 milliards de dégâts et les ouragans Milton et Hélène en 2024 ont provoqué respectivement entre 160 et 180 milliards et entre 225 et 250 milliards de dégâts.

Des maisons qui ne sont plus assurées

 

L'incendie de Pacific Palisades pourrait ainsi devenir l'incendie le plus coûteux de l'histoire, note ainsi le climatologue américain Daniel Swain, interrogé par CBS(Nouvelle fenêtre). Et ces feux dévastateurs s'inscrivent dans une "crise de l'assurance" face à la multiplication des catastrophes naturelles en Californie, notent nombre de médias américains, dont NBC(Nouvelle fenêtre). "Beaucoup de compagnies d'assurance ont résilié les garanties de nombreuses familles qui ont été affectées et qui seront affectées, ce qui va repousser ou peser sur leur capacité à se remettre", a déploré la vice-présidente Kamala Harris, ancienne sénatrice de l'Etat de la côte ouest du pays.

Début 2024, rappelle Associated Press(Nouvelle fenêtre), State Farm, le deuxième plus gros assureur de Californie, a arrêté de couvrir 72 000 logements. Et avant lui, en 2023, sept des douze plus grandes compagnies d'assurance en parts de marché en Californie ont suspendu ou restreint l'émission de nouvelles polices dans l'Etat, rappelle l'agence de presse. "L'une des principales compagnies d'assurance a annulé toutes les polices de notre quartier, il y a environ quatre mois", a témoigné l'acteur James Woods sur le réseau social X(Nouvelle fenêtre).

Pour y faire face, la Californie a mis en place un système public d'assurance, baptisé Fair, pour les propriétaires ne trouvant plus d'assureur privé. Et les autorités ont mis en place une nouvelle réglementation, permettant aux assureurs de prendre en compte le changement climatique au moment de fixer leurs tarifs. Mais "on peut s'attendre à ce que les assureurs demandent des augmentations de primes", s'inquiète un économiste cité par Associated Press. 

Vers des contrats de plus en plus chers

 

"Nous allons vers un avenir où l'assurance ne sera ni disponible ni abordable", alerte Dave Jones, directeur de la Climate Risk Initiative à l'université de Berkeley, dans le Washington Post(Nouvelle fenêtre). Et le problème ne touche pas que la Californie. Un rapport sénatorial américain(Nouvelle fenêtre) datant de décembre dernier cite la Floride, la Louisiane ou encore le Texas. Et voit plus large encore : "Si les Etats-Unis et le monde ne passent pas rapidement à l'énergie propre, les phénomènes météorologiques extrêmes liés au climat deviendront à la fois plus fréquents et plus graves, ce qui entraînera des assurances de plus en plus rares et des primes de plus en plus élevées."

"Cela se traduira par une chute de la valeur des biens immobiliers dans les communautés où l'assurance devient impossible à trouver ou excessivement chère, qui pourrait déclencher une crise financière de grande ampleur, semblable à celle de 2008."

Les auteurs d'un rapport sénatorial américain

Toutefois, les compagnies d'assurance se veulent cette fois-ci rassurantes. Elles pourront "absorber les pertes" et faire face à l'indemnisation des dégâts provoqués par les incendies à Los Angeles, a assuré Standard and Poor's(Nouvelle fenêtre). Selon l'agence de notation, les assureurs commencent l'année 2025 avec de confortables réserves financières grâce aux bons résultats financiers engrangés en 2023 et en 2024 et elles ont fortement réduit leur présence dans les régions californiennes très exposées aux risques d'incendies. Le commissaire aux assurances de Californie, Ricardo Lara, a de son côté annoncé une protection pendant un an pour les propriétaires des zones touchées et avoisinant ces incendies, contre les non-renouvellements et résiliations de garanties. 

Un système à repenser à long terme

 

Mais les assurances pourront-elles toujours couvrir les dégâts à l'avenir, alors que les scientifiques rappellent régulièrement que le changement climatique augmente la fréquence des événements météorologiques extrêmes ? En Californie, la stratégie d'adaptation de l'Etat(Nouvelle fenêtre) évoque "une augmentation allant jusqu'à 77% de la superficie moyenne brûlée et une augmentation de 50% de la fréquence des incendies dépassant 25 000 acres [soit plus de 10 000 hectares] d'ici 2100". 

"Parce que nous n'agissons pas assez vite pour abandonner les combustibles fossiles, nous avançons très lentement vers un avenir non assurable aux Etats-Unis."

Dave Jones, directeur de la Climate Risk Initiative

dans le "Washington Post"

"Il y a un manque de pensée à long terme, au-delà du quotidien. Il y a des éléments qui permettent de prédire, de budgétiser les fonds pour que, sur de longues années, on mutualise les risques", fait valoir Myriam Merad, chercheuse du CNRS au Laboratoire d'analyse et modélisation de systèmes pour l'aide à la décision. "C'est un système assurantiel à repenser, et ce n'est pas qu'un problème scientifique et technique, mais bien politique."

Et Reclaim Finance de pointer la responsabilité des assurances mêmes dans le réchauffement : "Malgré une facture climatique toujours plus lourde et un risque grandissant d'un monde inassurable, les grands (ré)assureurs continuent d'exacerber le dérèglement climatique, en soutenant l'expansion des énergies fossiles", écrivait en décembre(Nouvelle fenêtre) l'ONG, membre de la coalition Insure our Future, distribuant chaque année les bons et mauvais points aux assureurs et réassureurs, en attribuant un score à leur politique encadrant les énergies fossiles.

Date de dernière mise à jour : 11/01/2025

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